Histoire d'un marin cavernicole

Déroulement de l'expédition d'Octobre 2009

 

EXPEDITION PADIRAC « 120 ANS » - OCTOBRE 2009

 

 

 

 

 

Présentation :

 

 

 

Il y a 120 ans Edouard-Alfred Martel et trois compagnons intrépides se lançaient dans l'exploration du Gouffre de Padirac. Avec des moyens rudimentaires ils descendaient dans l'abime, et initiaient l'étude du réseau de la rivière souterraine.

 

 

Depuis ce temps d'autres aventuriers se sont succédés dans cette entreprise, et aujourd'hui le Comité Départemental de Spéléologie du Lot http://cds46.free.fr/ poursuit inlassablement cette recherche en organisant des expéditions régulières dans le Gouffre.

Cette expédition qui est entrée sous terre le samedi 24 octobre 2009 pour une durée d'une semaine est la plus importante depuis 1989, et  pour marquer le 120 ième anniversaire de la descente de Martel, les spéléologues sont venus en force dans l'espoir de faire avancer la connaissance de la cavité : 37 participants se sont donnés des objectifs ambitieux à réaliser pendant les huit jours qu'ils vont passer sous terre.

 

 

Mais au-delà de cet anniversaire prestigieux, cette expédition  a aussi le parfum d'un autre anniversaire : 30 ans. En effet, il y a 30 ans, Jean-Marc et moi découvrions ensemble le Lot souterrain pour la première fois et ce fut vraiment un immense plaisir que de partager à nouveau après tant d'années cette passion commune  pour la spéléologie.

 

 

 

 

1979, grotte de la vieille dame, Jean-Marc (combinaison bleue) et Erich (casque rouge)

 

 

 

2009 Jean-Marc à Padirac

 

 

 

 

Programme :

 

 

 

Il y avait vraiment de nombreux objectifs au programme ambitieux de cette expédition.

En plus des spéléo, deux journalistes de France 3 Cahors ont suivi l'expédition pendant cinq jours sous terre. Ils ont vécu (plus ou moins bien d'ailleurs) au rythme des spéléologues et ont filmé la progression et  les découvertes  http://www.youtube.com/watch?v=t-ufb0Za_98

 

 

  • Investigation en plongée du système noyé par trois équipes ; celle de Bernard Gauche (le spéléologue plongeur qui a relié la résurgence au gouffre en 1996) a tenté de relier le déversoir et la perte des pirates ; l'équipe de Laurent Rouchette qui a continué d'explorer l'amont de l'affluent Sylvain Pezet et l'équipe formée de Nadir Lasson, Jérôme Lippart et Franck Bréhier qui a revu en détail les galeries exondées après le siphon terminal
  • De la biospéléologie avec Jean-Michel Bichain, spécialiste de faune souterraine au Muséum d'Histoire Naturelle de Paris, qui a étudié la faune cavernicole et plus particulièrement les Bythinelles.
  • Etude hydrogéologique du réseau
  • Topographie
  • Photographie
  • Désobstruction 

 

N'ayant pas d'objectif précis, Jean-Marc et moi nous sommes proposés pour accompagner l'équipe plongée de Bernard Gauche et lui assurer le portage de son matériel. Nous avons donc vécu au rythme du portage des sacs et des attentes en bord de siphon.

 

 

 

 

Topograpghie d'ensemble des galeries pincipales

 

 

 

 

 

Déroulement de notre expédition :

 

 

 

Samedi 24 octobre 2009, parking du gouffre. Un froid soleil automnal illumine la troupe multicolore de spéléologues qui commence à s'activer. Les sacs sortent des voitures, les uns enfilent leur équipement encore propre et rutilant, les autres discutent, se retrouvent ou font connaissance. « Tiens ! Tu es là toi aussi ! », « Mais je te connais… on s'est croisé au gouffre machin il y a 10 ans, tu te rappelles ! »

 

 

 

 

Sur le parking du gouffre les équipes se préparent

 

 

Fier de mon statut d'ancien (c'est ma seconde participation) je guide Jean-Marc pour les ultimes préparations administratives, nous récupérons nos canots et retrouvons Bernard, Jean-Claude et Matthieu avec qui nous ferrons équipe jusqu'à mercredi (En effet les trois sortiront mercredi alors que nous resterons sous terre jusqu'à samedi).

 

 

 

 

 

09h30 une fois faite  la traditionnelle photo de groupe, nous nous engouffrons (Ah, ah…) dans les ascenseurs, empruntons les barques en compagnie d'un guide du gouffre direction le terminus des touristes.

 

 

En empruntant l'assenceur, sous l'oeil inquiet du liftier!

 

 

Dans les barques des touristes..Encore quelques minutes de confort avant l'effort

 

Là commence l'aventure, nous gonflons nos canots, enjambons le garde fou et grimpons avec nos sacs dans nos frêles embarcations.

Débute alors une succession d'embarquement / débarquement de gours en  gours avec nos trois sacs sur le dos (perso j'avais avec moi deux sacs – vêtements/bouffe/duvet- et une bouteille de plongée) le niveau de la rivière est assez bas. Jean-Marc en profite tout de même pour nous distraire avec un magnifique plongeon sous son bateau….. « Brrr elle est froide ! »

Puis se succèdent les obstacles : grande barrière, barrière du fuseau, vire de Joly, tout cela jusqu'au grand Chaos. C'est le domaine de la boue…Et comme les eaux sont basses les obstacles s'en trouvent plus hauts.

Après le grand Chaos il n'y a plus d'eau, on est obligé de tout porter, sacs, bouteille, bateau, pour s'alléger un peu on fait des aller-retour. Même le déversoir, d'habitude fougueux et bruyant est sec.

Nous atteignons le Chaos Martel vers 17h00, un peu fourbus et installons notre bivouac en haut de la salle, une petite coulée d'eau claire alimente un bidon que nous avons posé là.

 

 

Jean-Claude au bivouac du Chaos Martel

 

 

Les réchauds à gaz crépitent, pastis pour l'apéro, une soupe, un bon plat de spaghetti bolognaise et au lit !

 

 

 

 

Dimanche 25 octobre : Réveil paresseux après un bon tour de cadran, petit dej' copieux et voilà toute l'équipe qui s'ébranle direction la salle Bimisch. Le but de la journée est d'acheminer au siphon aval de l'actif les 4  bouteilles et le matériel de plongée de Bernard. On retrouve Florian et sa troupe qui encadre l'équipe TV de France 3. Equipement par Florian des puits (environ 25 m en plusieurs fractionnements) et nous voilà les pieds dans la rivière. L'ambiance est toute autre, nous retrouvons l'actif, l'eau le bruit des cascade…La grotte revit !

 

 

Bernard s'équipe avant de plonger

 

Le spéléonaute...

 

 

Il faut équiper Bernard, la TV filme. Bernard disparaît dans le siphon et l'attente commence.1 heure plus tard des phares éclairent la vasque notre plongeur est de retour. « J'ai trouvé le collecteur ! Mais c'est profond : toute la plongée par moins 30 mètres ! Il faudra revenir avec plus d'air mais c'est très positif ! ». Tout le monde écoute le rapport du plongeur fasciné. Et puis, on remonte on déséquipe et on rentre au bivouac du Chaos Martel, bien crevé et heureux du bilan de cette journée : premier objectif atteint.

Encore une nuit tranquille dans un duvet bien sec et isolé du sol par le canot retourné qui sert de lit.

 

 

 

Seul un oeil sort du duvet...

 

 

 

 

Lundi 26 octobre : Encore un objectif plongée. Cette fois Bernard et Jean-Claude ambitionnent de plonger l'aval du réseau Rasseneur. Nous quittons donc le bivouac avec tout le matériel et les canots, car il nous faut se rendre au Rasseneur, traverser le quai aux fleurs et les chaos qui lui font suite. Arrivé au confluent de la rivière de Joly, nous laissons les canots qui ne nous sont plus d'aucune utilité. Le matériel traversera la salle de l'avenir au moyen de la tyrolienne tandis que nous empruntons la vire. Nous traversons le bivouac 5000, vide de ses occupants et descendons au fond du « Rasseneur ». C'est presque trois heures qu'il nous faudra attendre dans le froid et la boue avant de voir revenir nos deux plongeurs avec un sourire jusqu'aux oreilles. « On a fait la topo ! Bernard a trouvé un collecteur dans le deuxième siphon ! C'est grand, c'est clair : faut y revenir ». Deuxième objectif atteint lui aussi. On remballe et on retourne au Chaos Martel. En passant par le 5000 on apprend que l'équipe en charge de désobstruer le bouchon d'argile qui empêche le passage vers le réseau de La terre à l'eau a réussi son pari ! Encore un objectif atteint. Petite pause et retour au bivouac pour un petit apéro et un bon repas. Extinction des feux, à demain.

 

 

 

Mardi 27 octobre 2009, bivouac du Chaos Martel. L'équipe s'ébroue tout doucement, la soirée ayant été longue, nous sommes tous un peu fainéants pour sortir des duvets et enfiler les combinaisons froides. Au programme de la journée, visite du « de Joly » pour Bernard Jean-Claude et Matthieu quant à nous, Jean-Marc et moi, nous allons acheminer tout notre matériel au bivouac des 5000. Nous trainons un peu pour ranger les bidons dans les sacs et ce n'est qu'après avoir pris le repas de midi que la troupe se mets en route. Nous franchissons pour une dernière fois la vire caillouteuse qui donne accès au Chaos et embarquons pour franchir le quai aux fleurs. Le niveau de l'eau a encore baissé, il nous faudra débarquer à mi parcours pour alléger nos canots. Puis on traverse un, puis deux abominables chaos glissants avant d'arriver à la confluence du de Joly puis la salle de l'avenir. Le captage d'eau qui alimente le bivouac des 5000 coule encore malgré la sécheresse, c'est bon signe cela évitera de devoir faire des corvées d'eau jusqu'au lac de l'espoir.

Il est déjà tard dans l'après midi quand nous arrivons au 5000. Certains lèvent le camp car ils ont prévu de ressortir mercredi, et ils entament déjà leur retour vers le gouffre. Leur départ libère des places.

 

Home, sweet home

 

On récupère la « tente » des toulousains du Spéléo club Airbus, stratégiquement bien placée. Les autres équipes arrivent avec le bilan de leur journée, l'apéro sort des bouteilles et tout le bivouac s'anime, c'est une ambiance fantastique et chaleureuse qui n'existe nulle part ailleurs.

 

Au bivouac des 5000

 

 

 

Mercredi 28 octobre 2009, le bivouac s'anime et les ronflements laissent la place au bruit de gamelle. Avec Jean-Marc nous avons décidé de jouer les touristes et d'aller trainer en direction de la rivière de Lavaur. Visite-exploration de l'aval depuis le bivouac, nous irons jusqu'aux allées cavalières. Au retour nous avons pris le temps de gratter un peu au niveau de la salle de l'étoile, nous avons visité quelques galeries supérieures, escaladé des cordes dont le diamètre s'apparentait à celui d'un lacet de chaussure…si, si ça tient ! Nous avons apprécié le travail de désobstruction effectué par nos camarades au niveau du bouchon d'argile qui interdisait jusqu'alors l'accès au réseau de la Terre à l'eau. Puis retour au bivouac en soirée.

 

Jean-Marc sort du shunt de la "Terre à l'eau"

 

Tard le soir arrivent Vanessa, Lionel et Joël, ils viennent de dehors et sont rentrés sous terre le matin même. Ils ont croisé les équipes qui sortaient dont celle des journalistes de France3 fatigués et heureux de l'expérience.

Comme à l'accoutumé le bivouac devient lieu d'échange et de discussions sur nos résultats et nos projets.

 

 

Jeudi 29 octobre 2009. Il y a des jours ou le courage et la motivation ne sont pas au rendez vous, ce jeudi en est un. Nous sommes donc restés à glander au bivouac. Mais la flemme est contagieuse et nos amis les brivistes ne se font pas prier pour rester nous tenir compagnie. C'est alors que Jean-Marc déniche un vieux jeu d'échecs abandonné dans un coin, il manque bien quelques pièces mais deux petits cônes d'argile feront des pions noirs et deux morceaux de calcite se substituent aux cavaliers blancs. Il s'ensuit alors un tournoi endiablé d'échecs, Romain le challenger tentera bien que mal à mettre Jean-Marc et son roi en échec, mais en vain !

 

Les joueurs d'échecs

 

 Pendant ce temps Catherine qui ne perd pas une occasion a sorti son carnet et son crayon pour croquer nos joueurs. Il est sûr que ce dessin finira sur son blog.

 http://calcairecrayon.canalblog.com/

 

 

 

 Le bivouac vu par Cathy

 

 

Vendredi 30 octobre 2009.  Après une nuit à rêver de diagonale du fou et de cavaliers la petite communauté des 5000 se réveille. Nous quittons le bivouac vers dix heures, chargé de tout notre matériel, direction la sortie. A la salle Bimisch nous récupérons une bouteille de plongée de Bernard que nous devons ressortir du gouffre.

 

 

Dans la rivière sans eau

 

 

Un fois passé le grand canal nous dégonflons nos canots et progressons à pieds secs dans le lit de la rivière asséchée.  Nous progressons de conserve avec les brivistes, Romain nous aide à porter la bouteille. Petite halte au niveau des gours suspendus ou nous abandonnons nos camarades puis Jean-Marc et moi continuons seuls jusqu'aux « Lavandières » où nous établissons un petit bivouac. Là, nous regonflons nos canots en utilisant le reste d'air comprimé de la bouteille de plongée, et comme il n'est pas encore trop tard nous faisons passer les sacs dont nous n'avons pas besoin de l'autre coté du Grand Chaos.et revenons nous installer pour la nuit dans notre bivouac improvisé dans le fond d'une rivière à sec.

Il est temps de manger, un fond de calva ferra office d'apéro, une soupe d'asperge, un bon plat de pates à la bolognaise et un riz au lait…quoi de meilleur. Et une fois n'est pas coutume je taxe Jean-Marc d'une cigarette que j'apprécie à sa juste valeur...Une pas plus !!

Extinction des feux vers 21h00

 

 

 

 

Samedi 31 octobre 2009.  Dernière nuit sous terre, dernier réveil, dernier enfilage de combinaison humide et fraiche. Après un rapide petit déjeuner, nous pulvérisons notre record de franchissement du Grand Chaos tellement Jean-Marc est pressé de retrouver ses sacs et surtout son paquet de cigarettes, déposés de l'autre coté du chaos.

Derrière nous le bruit d'une autre équipe résonne dans les galeries, mais les obstacles, rendus hauts et glissants à cause du manque d'eau ne favorisent pas les dépassements. Comme à l'aller, les barrières, vires et terrasses nécessitent de faire la chaine pour passer les sacs. Enfin devant nous se dresse l'ultime barrage : La Grande Barrière, terminus d'E.A Martel. Nous sommes rattrapés par l'équipe des spéléo de Brive avec qui nous faisons une petite pause au sommet de la barrière.

Une fois la grande barrière passée, ce n'est plus que canotage tranquille entrecoupé de marche dans le lit sableux de la rivière, et puis après une série de gours, c'est le splendide lac des étroits. Quelques mètres plus loin le passage des étroits sonne la fin de l'expé : nous arrivons dans la partie touristique.

 

Il nous faut à peu près une heure pour laver notre matériel, car comme le veut la convention qui nous lie à la société commerciale qui exploite le gouffre de Padirac, il faut que nous soyons parfaitement propres pour emprunter le chemin du retour et les ascenseurs ( ce qui semble d'ailleurs tout à fait normal)

16h00, nous empruntons les barques des touristes direction les ascenseurs et la sortie.

Après une semaine passée sous terre, la lumière du jour nous attend, ainsi qu'une bonne bière fraiche.

 

Maintenant plus qu"une seule idée: Quand est ce que l'on y retourne ?? 



07/11/2009
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